Le projet danse émergence remonte à mi 2006, et a connu de multiples vicissitudes, au gré des changements de gouvernement ( gouvernement local de Polynésie Française), au gré de l'apparition puis de la disparition du défunt centre de Création Contemporaine de Polynésie.
Genèse du projet :
Après plusieurs mois de réflexion, je propose en Juin 2006 le projet au ministère de la culture de Polynésie. Il s'agit de créer une compagnie de danse contemporaine tahitienne .
C'est le début d'une saga ininterrompue, avec pas mal d'espoirs anéantis successivement par l'instabilité politique, puis les' incroyables développements du centre de création contemporaine de Polynésie Française.
Les services de l'Etat sont jusqu'à lors les seuls à encourager la poursuite du projet.Tout ceci fera l'objet de posts particuliers.
Le projet danse-émergence : créer une compagnie de danse tahitienne contemporaine professionnelle au plein sens du terme : un défi à plus d’un titre
Le caractère expérimental du projet
En Polynésie, appartenir à une compagnie de danse professionnelle requiert pour les artistes impliqués un bouleversement des mentalités, un changement notoire dans la perception de la danse, de sa finalité et de sa pratique.
Concevoir la danse comme une activité professionnelle à laquelle on s’adonne quatre heures par jour – avant de passer à six heures après quelques mois – principalement pendant les heures ouvrables, pour un engagement de dix-huit mois constitue en soi une véritable révolution. Car les danseuses devront suivre une préparation physique incluant la barre au sol.
Percevoir en contrepartie un cachet conséquent, équivalent à un salaire, peut paraître actuellement impensable.
Par suite, la pratique de la danse dans cette perspective, et à ce rythme nécessite une approche concrète bien différente des pratiques habituelles.
La régularité de la pratique est indissociable de la vie de danseuse. La pratique doit être continue et ne porte ses fruits qu’à terme c’est à dire au bout de plusieurs années !!!!
Ce raisonnement que l’on peut considérer comme un pléonasme est absent chez les danseurs polynésiens.
Relativement aux pratiques , et au discours habituels dans le champs de la danse contemporaine, le projet danse-émergence ne se réclame pas d’une particulière exceptionnalité.
Par contre dans le champs de la danse tahitienne, danse-émergence est une aventure expérimentale à plus d’un titre.
La danse dans le paysage culturel polynésien
La pratique
Autant la danse est appréciée comme activité de loisir, autant elle est dépréciée et généralement mal perçue comme activité professionnelle. La danse ne fait l’objet d’aucun encadrement réglementaire, n’a pas d’existence légale comme activité économique.
Dans la société polynésienne contemporaine, la danse est intimement liée à une quête identitaire, mais paradoxalement sa pratique se limite à une activité sportive ou culturelle. La danse est omniprésente, elle a un rôle social évident mais reste uniquement un activité physique jubilatoire et collective.
Elle n’est qu’une occupation pour les enfants, un sport pour les adultes, et au mieux un acte de participation à la vie communautaire .
La danse tahitienne est pourtant d’une grande richesse, mais très peu de pratiquants s’en soucient.
L’encadrement
La danse ne fait l’objet d’aucun encadrement : juridiquement elle n’existe pas.
Ni la pratique amateur ni le métier de danseuse n’ont une existence légale.
La pratique de la danse ne fait pas non plus l’objet d’un suivi médical, en dépit des contraintes qu’elle impose au corps, lorsqu‘elle est pratiquée à haute dose, sur de courtes périodes, comme pendant les trois à quatre mois mois par an pour la préparation du festival de juillet, le Heiva.
Le corps médical dans son ensemble ignore les contraintes de la danse tahitienne sur le corps, à l’exception des chirurgiens orthopédique, qui opèrent les genoux très fréquemment, chez des sujets de moins de vingt-cinq ans.
L’absence d’échauffements, la méconnaissance du placement du corps et de la verticalité sont à l’origine de nombre de problèmes. La danse tahitienne se pratique genoux fléchis, et en bonne partie au raz du sol, ou même sur les genoux.
Enfin la danse comme activité économique n’a pas d’existence légale.
Non seulement nous n’avons pas de statut de l’artiste, mais le code du travail de Polynésie ne propose aucun type de contrat susceptible de s’appliquer aux artistes du spectacle vivant. Ceci de l’aveu même des services de l’inspection du travail.
Pour cette raison le projet danse-émergence est un challenge.
A tous les niveaux, car il faut convaincre à la fois les danseuses-danseurs, et les personnes disposées à financer un projet aussi … curieux, dans le contexte.
Et de surcroît, il restera toujours un incertitude quant à l’aptitude psychologique des éléments de la compagnie à tenir la distance.
Car la fatigue physique et mentale inhérente au métier de la danse est totalement inconnue des danseurs polynésiens . Même si les cachets sont conséquents, il n’est pas dit que « ça le fasse »
Mais bon, allez savoir…un jour peut-être
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